20 juin 2016 Arrivée à l'IGR (Gustave Roussy à Villejuif), on m'a fait un myelogramme,
Le myélogramme consiste à prélever de la moelle osseuse pour l'analyser.
On ponctionne dans un os, soit la hanche , soit le sternum.
Pour moi c'était le sternum, et comme c'était urgent, je n'ai pas d'anesthésie mais juste des glaçons, j'étais sous anti douleur de toute façon.
Heureusement je ne me rappelle beaucoup pas de myélo (oui ce n'est souvent que le premier d'une longue série). Comme tous les examens moins on stresse, moins ça fait mal. Donc l'examen peut être juste désagréable ou terriblement traumatisant. Aujourd'hui ça me fait toujours peur et je trouve ça très douloureux, mais je suis particulièrement chochotte.
L'analyse confirme la LAM (leucémie aiguë myéloïde), mais ma saturation baisse, rapidement j'ai dû être endormie et mise sous respirateur donc je ne me rappelle plus de rien.
Les blastes (les cellules immatures qui prolifèrent dans le corps lors d'un cancer du sang) formaient des caillots qui obstruaient mes poumons. Les échanges gazeux ne se faisaient plus. Au lieu de fabriquer des globule blancs je fabriquais des cellules atrophiées qui envahissaient tout et empêchaient le sang de faire son travail comme m'oxygéner. Je faisais des embolies généralisées. J'étais en SDRA (syndrome de déficience respiratoire aiguë) le respirateur ne suffisait plus. J'ai donc était envoyé à la Salpétrière où on m'a branché sur un ECMO (extracorporeal membrane oxygenation). Cette technique permet d'extraire le sang par la veine fémorale , il est oxygéné dans une petite machine (comme pour une dialyse via une membrane) et renvoyé dans mon corps tout plein d'oxygène. Toujours endormie, ma famille avait été prévenue, je n'avais eu le temps que d'appeler mon chéri je crois, ils sont venus me veiller pendant la semaine où j'étais endormie. Pour eux c'était la grosse angoisse, en 2017 seul 50% des personnes survivaient au passage à l'ECMO, c'était l'appareil de la dernière chance. Ils habitais en 900 km, je suis la petite dernière et au téléphone on leur annonce que je suis entre la vie et la mort.
Mes parents on vieilli de 20 ans d'un coup.
Ma soeur E est venue aussi. Elle m'a protégé.
Au risque que mon coeur ne tienne pas , s'est réjouté les complications habituelles de la réanimation : fièvre, bactérie, diahrées .... Bien sûr je ne me rappelle de rien. Ils ont essayés un premier réveil, mais j'étais assez agitée. J'essayais d'enlever les tuyaux. Je pense que cela correspond aux cauchemars que je faisais. D'horrible cauchemars où j'étais un cobaye, prisonnière. Parfois je savais quelqu'un m'attendait pour me sortir de là mais quand ça allait arriver, le cauchemar recommençait au début. J'avais dû ouvrir les yeux car dans mon rêve j'étais dans un endroit avec un signe en étoile (bon en fait c'était la ventilation de ma chambre) ...
(hihi j'aurais pas dû regarder autant d' X files et Caméléon et autres séries sur les complots, j'étais en plein dedans) Au final je me suis réveillée mais je n'étais pas sûre d'être sortie du rêve car il y avait le signe du complot (la ventilation donc), j'ai mis du temps à faire confiance aux soignants et à ma famille, d'ailleurs au début je ne les reconnaissais pas, et avec les tuyaux je ne pouvais pas m'exprimer. C'est vraiment l'angoisse : ma famille a été particulièrement présente et patiente. Je leur suis infiniment reconnaissante.
Ca me rend triste de savoir que d'autres patients peuvent se sentir aussi perdu et aussi impuissant sans avoir personne pour les consoler et rassurer.
Je pense aussi à ceux en période de Covid, qui n'ont pas pu avoir de visite. C'est vraiment angoissant d'être impuissant et sans défense.
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